Itinéraire 10: Les Hautes-Terres de Provence

Sauvage est la Provence, ça ne fait aucun doute. Parfois très, parfois moins en ses hauts lieux touristiques où jamais elle n’en perd ses charmes. Aux confins de la région où le Dauphiné se profile, le circuit que vous parcourrez est tout simplement nature. Parlez des hautes terres à votre passagère et dites-lui d’oublier le tumulte et les commerces bling-bling avant d’embarquer pour 112 km sans fard aux yeux ni odeur de circulation. Veillant sur la Durance depuis sa citadelle au sommet de la vieille ville, Sisteron donne le départ d’un itinéraire que vous pourrez facilement boucler en une seule journée. Ses fantômes, pas bégueules, vous tireront par les pieds à votre retour pour la visite des remparts. Mais avant d’y revenir, ouvrez le cœur à d’autres plaisirs en mettant l’aiguille de la boussole au Nord . Oh, pas le grand Nord je vous rassure, vous ne quitterez pas les Alpes-de-Haute-Provence ! Snobant l’autoroute et la grande route des Alpes, visez d’entrée la D951 marquée de jaune sur la carte. Vous y êtes ? Cette route louvoie entre les dernières villas avant que son goudron clair arpente la campagne. Voyez, là sur la droite, la silhouette lointaine de la montagne de Gache et les premiers vergers. C’est sûr, vous y êtes ! Mais pas pour longtemps, car après seulement 6 km, vous quitterez cette petite route pour une encore plus petite, montant en lacets vers le village perché de Valernes. Un panneau annonce la Motte à 13 km. Jusqu’à Vaumeilh, le tortillard chaotique et frais laisse peu de place aux croisements avec les autos. Heureusement, il y en a très peu ! Vous montez désormais entre champs de blé et chaînées jusqu’à débouler, au détour d’une épingle, sur des paysages plus vastes, véritables tableaux rehaussés d’une bastide ou d’un champ de fleurs bleues avec les monts en toile de fond. A Vaumeilh, la devanture du Café Tabac vous attendrira sûrement. Sur la route minuscule, vous naviguerez entre ombre et soleil. Les plaques du bitume, victime innocente des chaleurs estivales, engagent à une conduite tranquille malgré la présence de courbes alléchantes. Sur la langue d’asphalte dominant la vallée, des cavaliers vous saluent, pensant que vous roulez à 30 km/h par unique respect de leurs montures. Lorsque vous les verrez opter pour un chemin de traverse donnant immanquablement sur une propriété privée, vous aurez envie de les suivre. Ne le faites pas, car après la jolie descente qui suit le village de Melve, vous parviendrez à la Motte-du-Caire, véritable de chef-lieu du parcours d’au moins… 500 âmes, où vous trouverez un bar-restaurant pour recharger vos batteries. En repartant, évitez de lever longtemps le nez au ciel, même si les planeurs tournoyant dans l’air chaud l’attirent comme un aimant. Humez plutôt la nature odorante à portée de roues, car la conduite moto n’est pas du  cinéma ! En parvenant au Caire, vous pourrez vous désaltérer à la fontaine du village. Mais, ici pas le moindre magasin. A quelques kilomètres, c’est au tour de la Via Ferrata de vous faire de l’œil. Les amateurs y viennent de très loin, alors si vous ressentez le besoin de vous dégourdir les jambes, peut-être vous laisserez-vous tenter par un bol de sensations totalement sécurisées. En longeant le Grand Vallon et jusqu’à Gigors par le col de Sarraut sur votre destrier, vous ne récupérez pas de vos émotions tellement l’environnement minéral se montre enivrant parfois. A Bellaffaire, inutile de foncer vers le lac de Serre-Ponçon puisque le parcours doit revenir à son point de départ. La redescente s’en effectue d’abord par la D951A à travers la Haute Vallée du Sasse. A Turriers, l’église du XIème vaut qu’on s’y intéresse. Puis direction Bayons par la D1 dans un univers de verdure resplendissant. Petite route et gros chaos. Peut-être des vaches en mal de trains vous regarderont passer. Après le gentil col des Sagnes culminant à 1200 mètres, les coquelicots forment à la belle saison des taches rouges dans les champs. Magnifiques ! « Les tourniquets » n’usurpent pas leur nom. Cette portion de route à l’approche de la Clue de Bayons vire et revire au gré de gorges pour dominer à un moment une suite de lacets laissant l’amateur pantois. Dans ce décor qui voit passer chaque année le rallye de Monte-Carlo, vous naviguerez entre des parois étroites dont les chutes des roches friables peuvent atterrir sur  la route. Plus esthétiques que des rails métalliques, les petits murets de pierres qui bordent cette dernière depuis des siècles ne fait en rien regretter leur oubli par les services de l’équipement. Trois kilomètres après Clamensane, nous vous engageons à prendre sur votre gauche la direction de Valavoire. Passée le petit pont, la route étroite, délicieusement dégradée, monte sur 9,5 km à l’assaut d’une nature inviolée sans qu’on y croise d’âme. Au printemps, des petits torrents déboulent de toutes parts. Arrivée à Valavoire, village du bout du monde, la vue sur les monts environnants est franchement époustouflante. Après ce ravissement visuel, si le cœur vous en dit, vous pourrez effectuer la redescente en roue libre, comme à vélo, avant de retrouver la D951 bordée de pommiers protégés par des filets. S’ensuit une route en corniche traversant la forêt de la Sasse, rivière qu’elle domine entre chênes et sapins. A notre passage, elle était en réfection, mais bientôt elle sera neuve : une aubaine pour rallier sans tarder Sisteron où les fantômes des gens d’arme ayant gardé les remparts s’impatientent de vous revoir. N’abusez pas de leur patience…

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